Du sable rose d’Australie à une chaîne de montagnes antarctiques inconnue
Une équipe de scientifiques australiens établit un lien entre les plages roses du sud de l’Australie et le grand continent blanc et découvre au passage une ancienne chaîne de montagnes inédite.
Il existe à travers le monde nombre de plages dont le sable est rose, mais celles de la formation du cap Jervis, dans le sud de l’Australie, intriguaient particulièrement les scientifiques. Une équipe de recherche de l’Université d’Adélaïde s’est penchée sur la question et ses découvertes, publiées dans la revue Nature Communications Earth and Environment le 11 juin dernier, sont pour le moins surprenantes.
Pour posséder cette couleur, le sable contient du grenat, un minéral dont la couleur varie du rouge au noir, et qui compte deux sources en Australie. La première source provient de la formation de l’Adelaide Fold Belt, un phénomène géologique qui s’est produit il y a environ 514 à 490 millions d’années. Une seconde source provient de la formation du craton de Gawler il y a 3,3 à 1,4 milliards d’années. Or, une datation au laser a permis de déterminer que le grenat des plages de l’Australie-Méridionale était âgé de 590 millions d’années. Autrement dit, le minéral était soit trop vieux soit trop jeune pour s’être formé de manière locale.
Son origine est donc à aller chercher ailleurs. Au sens propre du terme. Sachant que le grenat est détruit par une exposition prolongée à un environnement marin, les scientifiques se sont donc mis à chercher une possible source pas trop éloignée. Ils se sont donc tournés vers l’Antarctique, un continent dont l’histoire géologique est compatible avec le processus de formation du minéral. « Le grenat nécessite des températures élevées pour se former et est généralement associé à la formation de grandes ceintures de montagne, et c’était une époque où la croûte d’Australie du Sud était relativement fraîche et non montagneuse. », mentionne Sharmaine Verhaert, doctorante en géologie et principale auteure de l’étude dans un communiqué de presse publié par l’Université d’Adélaïde le 12 juin dernier.
Du grenat avait déjà été découvert dans les montagnes transantarctiques de l’est de l’Antarctique. Cachée sous l’épaisse calotte glaciaire, les chercheurs pensent que la région abrite une ceinture de montagne vieille de 590 millions d’années. À la fin du Paléozoïque, lorsque le supercontinent Gondwana reliait l’Antarctique à l’Australie, du sable glaciaire riche en grenat aurait voyagé jusqu’en Australie, transporté sur de longues distances par les glaciers qui ont également servi à protéger le grenat de l’abrasion. « Les gisements de grenat ont ensuite été stockés localement dans des dépôts sédimentaires glaciaires le long de la marge sud de l’Australie jusqu’à ce que l’érosion les libère et que les vagues et les marées les concentrent sur les plages du sud de l’Australie. », mentionne le Dr Stijn Glorie, professeur assistant de géologie et co-auteur de l’étude.
Mais l’intérêt de cette recherche ne s’arrête pas là. En identifiant la source du grenat des plages australiennes, l’équipe de recherche a possiblement découvert une chaîne de montagnes jusqu’ici inconnue, cachée sous la calotte glaciaire de la Terre de Victoria et des montagnes Transantarctiques. Une découverte qui pourrait redéfinir l’histoire géologique et le début de la formation de l’océan Pacifique.
Mirjana Binggeli, Polar Journal AG
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